Charles Fourier-L'opéra et la cuisine
Charles Fourier, est né le 7 avril 1772 à Besançon et mort le 10 octobre 1837 à Paris.
Il est un philosophefrançais, fondateur de l'École Sociétaire, personnage emblématique du XIXe siècle.
« Où l'on apprend que l'opéra, composé de sept branches et d'un pivot passionnel, «fait partie intégrante de l'industrie, puisqu'il y intervient comme alternat nécessaire et aussi nécessaire que l'arrosage après la chaleur», qu'il n'existe pas moins de quarante-deux manières de cuire les œufs, que Fourier détestait, incidemment, vingt-sept sortes de soupes, et que l'apprentissage de la cuisine, mettant à profit la gourmandise gloutonne des enfants, est, au même titre que le goût de l'opéra, un des ressorts les plus méconnus de la véritable éducation. »
Voici la dernière de couverture de son livre L'opéra et la cuisine (publié en 1842 dans les Œuvres complètes et en 2006 en tant que livre), celle-ci ne montre- t-elle pas que Fourier malgré sa réputation de figure du « socialisme critico-politique » est un homme passionné ? Mettre autant de temps à classer chaque détail, chaque chose et prendre soin d'y donner un réel sens fait de lui un homme organisé et dévoué. Ce souci du détail le fera classer hommes et femmes en 810 catégories. Ces catégories correspondent à autant de passions que de sous-passions, que de sous-sous-passions, etc... Toutes différentes. Sur cette base de 1620 critères et caractères qu'il appelle une phalange, et de ce fait, chaque personne de cette phalange œuvre selon ses affinités, tout en accordant une place particulière à l'agriculture, ainsi qu'aux arts et aux sciences.
Charles Fourier considère donc que l'attirance naturelle des humains pour l'activité et la vertu est totalement meurtrie à cause du travail. Il souhaite valoriser le travail et le rendre plus actif et attractif, comparé à ce qu'il est actuellement.
Fourier n'est en rien opposé au travail, mais au sens que la société lui attribue, c'est cela qu'il critique.
Il estime que l'attraction passionnée est une impulsion donnée par la nature avant la réflexion et qui persiste malgré l'opposition de la raison, du devoir, du préjugé... que tout cela s'exprime en chaque être humain par l'intermédiaire de douze aiguillons. Il les appelle les douze passions radicales. Il distingue ainsi : cinq passions sensuelles, tendant à épanouir les cinq sens physiologiques ;quatre passions affectives, tendant à former spontanément des groupes : ambition, amitié, amour, famille
trois passions organisatrices, tendant à harmoniser entre elles les neuf précédentes : cabaliste ou goût de l'intrigue et du calcul, papillonne ou goût du changement, composite ou goût pour l'assemblage des plaisirs des sens et de l'âme qui engendre l'exaltation ;
Fourier est également très préoccupé par l'éducation et la place qu'elle prend dans la société. Pour lui, l'éducation de l'enfant passe par des travaux manuels, notamment la cuisine.
Les voies premières conduisant à l'accord du spirituel et du matériel en mode composé passent par l'opéra [p. 12] et la cuisine [p. 22]. Ces deux occupations habituellement reléguées à d'autres buts en Civilisation, deviennent moteur d'éducation et d'élévation.
Nous avons choisi de faire une analyse littéraire sur l'opéra et la cuisineoùil y écrit :
« Eloigner l'enfant de cet atelier qu'on nomme cuisine, ce serait lui enlever le plus fort de tous les stimulants. Rien n'est plus propre à intriguer les groupes d'enfants dans leurs travaux, que de les allier avec la gourmandise, leur passion dominante. C'est donc la cuisine qui doit être l'atelier favori de l'enfant, d'autant mieux qu'elle opère en toutes saisons, hiver ou été, tandis que l'agriculture, le jardin, quoique très utiles à éduquer l'enfant, sont en chômage une bonne partie de l'année. Les manufactures sont encore assez attrayantes pour l'enfant ; les petites forges, les petites charpentes, le charmeront moins, beaucoup moins que la cuisine, qui, exerçant en lui l'esprit et les sens, devient le plus puissant ressort de son éducation. A l'opéra, il se forme à la manœuvre, à la perfection des mouvements corporels ; mais c'est à la cuisine qu'il se forme aux combinaisons de fonctions agricoles et industrielles, aux raisonnements d'analyse et de synthèse qui l'engagent de bonne heure dans l'étude des sciences fixes.
C'est principalement dans le travail des cuisines que l'enfant s'efforce à distinguer les nuances passionnelles ou fantaisies graduées qui affectionnent chaque groupe. »
Charles Fourier dénonce fermement une de ses superstructures essentielles : l'éducation répressive et fermée à l'aube du XIX° siècle. L'éducation est mauvaise en bloc, car foncièrement antinaturelle et totalement manipulatrice. Elle bloque (ou détourne) toutes les valeurs, toutes les passions et toute la spontanéité qui font la richesse d'un individu. Elle mutile en uniformisant et elle enrégimente (il parle d'éducation « servile ». Elle ne concerne qu'une infime minorité de la population, écartant les pauvres et surtout les femmes. Il démontre que l'enfance est bien pour lui « l'enfance du désir » (formule qu'on peut prendre dans tous les sens), de la spontanéité naturelle et de la vitalité inclassable, tant les désirs sont diversifiés puisqu'ils n'ont pas encore été totalement pervertis par la civilisation.
Fourier insiste cependant pour que l'éducation soit liée au monde réel, ouverte sur la vie, la société, et essentiellement sur le monde du travail.
Il faut juste tenir compte de la spécificité enfantine pour rendre l'éducation, comme le travail, attractive, y compris en jouant sur des passions bizarres et qui ne sont pas conformes aux idées reçues comme le goût pour la saleté souvent fréquent chez les petits.
L'éducation tient un rôle essentiel, et doit commencer dès la plus petite enfance, voire dès la naissance, pour prendre l'enfant non perverti, et plus apte au changement.
Même si cela les protège, vise à prolonger l'enfance, ou renforce l'amitié au détriment d'une nature jugée trop bestiale pour les jeunes êtres, il n'en reste pas moins que sur le plan de la sexualité des enfants, Fourier semble rétrograde, et hors de toute réalité (refus de montrer) ou d'éducation sexuelle (refus d'expliquer ou de préparer ?).
De ce fait, nous comprenons mieux pourquoi pour lui, l'éducation est une chose primordiale et de ce fait que l'enfant pour s'occuper, doit se dispenser de certains plaisirs pour mieux grandir, de choses dont les jeunes du même âge ont envie. Les priver pour lui est une forme de protection, de les éloigner du danger en les occupant de l'autre côté. Il fait un plaidoyer pour une éducation moderne.
L'éducation est toujours innovante, c'est une « école active » avant la lettre, par exemple avec les propositions d'utiliser la cuisine et la gastronomie, le théâtre, les opéras et la musique, les classes ouvertes, la coéducation... dans son ouvrage L'Opéra et la cuisine., Fourier veut développer des méthodes et des arts nouveaux, pour développer l'individu dans son intégralité, le corps étant même placé avant l'âme. Quant à la cuisine comme lieu de formation, elle prend chez Fourier un rôle premier : c'est un lieu d'expérimentation et de travaux pratiques simples, c'est une production rapidement gratifiante (intellectuellement et physiquement, puisqu'on déguste avec plaisir les mets obtenus), c'est un moyen de combiner tous les sens au service de la formation, un endroit pour développer des positionnements sur l'hygiène, l'apprentissage du goût, de la diététique même si Fourier est plutôt poussé à la gourmandise. Enfin c'est un lieu d'échanges et de convivialité fraternelle évidents, ce qui ne peut que renforcer les aspects collectifs de la formation.
À la lumière de ces exemples, on voit bien que Fourier anticipe largement l'éducation par « centres d'intérêts » que beaucoup de mouvements pédagogiques vont propulser des décennies après lui. Fourier est au XIXème siècle le personnage principal de l'éducation moderne.
Fourier est vu comme exemple, comme prototype, comme moteur pour atteindre la nouvelle société, mais il est rarement vu pour lui-même et en fonction de ses propres besoins et de sa propre liberté : c'est pourquoi le retour aux fondamentaux anarchistes et à Fourier lui-même s'impose, souvent envers et contre ses principaux disciples

Nous avons choisi de poser la géocache de Fourier devant le lycée Condé. Profitant d'un bac professionnel cuisine, cet endroit allie les deux éléments essentiels pour Fourier, tel qu'il aurait aimé le faire.