Joseph Proudhon-La pornocratie
Pierre-Joseph Proudhon est né en 1809 et mort en 1865. Il est journaliste, économiste et sociologue, il se qualifie lui-même d'anarchiste. Issu d'un milieu modeste, il ira jusqu'au collège grâce à une bourse, puis après avoir travaillé comme correcteur, il fondera une petite imprimerie où il publiera son premier essai sur la grammaire.
Cet homme hostile à toute violence soutient les insurgés de 1848, mais désapprouve l'action révolutionnaire et pense que la transformation de la société doit être avant tout morale.
Très critique envers le capitalisme sans adhérer aux thèses du socialisme qu'il considère comme une utopie (voire comme un système autoritaire), il cherche une troisième voie, qu'il nommera « anarchie positive » ou « fédéralisme autogestionnaire ».
Ce n'est que plus tard dans sa vie qu'il s'intéressera à la place de la femme dans la société.
Il écrit son livre la Justice, dans lequel il incluait le couple androgyne comme unité sociale, sans toutefois leur attribuer une valeur équivalente aux deux personnes qui constituent ce couple
Cette thèse lui attirera de nombreuses critiques, plus particulièrement celles de deux femmes écrivaines. C'est à elles que Proudhon s'adresse en rédigeant La Pornocratie, il ne le terminera pas avant de mourir. Dans ce livre, il expose sa vision organique d'une société reposant sur la dualité des sexes. Pour lui, si un couple n'est pas double, il n'y a ni mariage, ni famille. Et sans foyer il n'y a pas de société encadrée.
Pour lui, l'individu seul n'existe pas, il se doit d'être accompagné. Tout est constitué de sous-parties liées entre elles par une relation d'interdépendance.
Il démontre ainsi pourquoi dans une société dans laquelle compte l'individu -qui lui-même n'est guidé que par ses intérêts et ses jouissances- aboutit, comme dans une société dans laquelle seul compte le groupe, mais par des voies différentes, au même résultat, à savoir la tyrannie.
Son livre La Pornocratie a été écrit en 1858. Il destiné à Jenny d'Héricourt et Juliette La Messine suite à leurs différentes altercations, livre inachevé. Kontre-Kulture le réédite en entier, accompagné d'une seconde partie intitulée Note et pensées. Répétant et développant les idées déjà présentées dans De la Justice.
La Pornocratie, qu'on pourrait définir comme une forme d'effémination de la société est selon Proudhon la seconde puissance à l'œuvre dans la France de son temps, juste derrière la puissance de l'argent. Il prétend émanciper les femmes, dissoudre l'ordre familial et social et s'exprime par diverses voies : le théâtre, l'utopie de l'amour par l'amour, le concubinat, l'idée du suffrage féminin, le malthusianisme, les femmes savantes...
« LA PORNOCRATIE OU LES FEMMES DANS LES TEMPS MODERNES
A Mmes J*** L*** et JENNY D'H***
Mesdames,
Je possède vos trois volumes, et je les ai lus : ce n'a pas été sans effort. Jamais je n'éprouvai pareil mécompte ; jamais plus détestable cause ne fut servie par si pauvres moyens. Je ne vous reproche pas vos injures : les injures, je les comprends quand elles viennent d'une indignation légitime, et je les subis en toute humilité, comme si c'était des raisons. Mais de la raison il n'y en a pas ombre dans vos attaques ; ce et ce qui m'affecte de votre part, c'est effronterie même de la déraison. Certes, mesdames, vous n'espériez pas que je répondrais à ce flux de paroles : vous teniez avant tout, à épancher votre bile ; le reste vous souriait peu. Une doctrine est jugée quand elle produit de pareils phénomènes : je n'avais qu'à me frotter les mains, et vous laisser dans votre triomphe. Quez pouvais-je souhaiter de mieux que de voir une prétendue antagoniste se ravaler par tout ce que la vanité blessée et la colère peuvent amasser de futilités dans un cerveau de femme ?
J'ai cru devoir, cependant, ne pas laisser tomber vos deux productions. Vous devinez facilement, mesdames que ce n'est pas sans motifs. Il s'agit de bien autre chose, en effet, que de vos déclamations et de mon ressentiment.
Notre décomposition sociale marche à vu d'œil ; plus j'en étudie les symptômes, plus je découvre que les libertés publiques ont pour base et pour sauvegarde les mœurs domestiques ; que les mêmes maximes par lesquelles on détruit les droits des peuples sont celles par lesquelles vous et vos coryphées vous renversez l'ordre des familles ; que toute tyrannie , en un mot, se résout en prostitution, et que la prostitution, étudiée dans son principe, est précisément ce que vous , mesdames, appelez, avec le Père Enfantin et ses acolytes, affranchissement de la femme, ou amour libre.
Est-ce ma faute, à présent si vous figurez, comme dames patronnesses, au premier rang de cette Pornocratie qui depuis trente ans a fait reculer en France la pudeur publique, et qui, à force d'équivoques et à l'aide de la corruption la plus subtile, s'est constituée partout des avocats, des philosophes, des poètes et des dévots ? Vous attaquez tout ce que j'aime et révère, la seule de nos anciennes institutions pour laquelle j'ai conservé du respect, parce que j'y vois une incarnation de la justice. Acceptez donc les conséquences de votre rôle ; subissez, sans tant de criailleries, les qualifications que vous inflige votre théorie ; quant à moi, appelez-moi Ogre, Minautore et Barbe-Bleue, je ne me plaindrai pas, si vous prouvez, par de bonnes raisons, que je me trompe. »
A cette époque, régnait le second empire de Napoléon III. En France les chemins de fer et l'industrie se développent. Le régime autoritaire évolue vers des formes plus libérales, Proudhon est anarchiste mais est quand même réactionnaire vis-à-vis du rôle de la femme.
Dans cet incipit, Proudhon répond à deux dames qui ont dû l'invectiver et se plaindre de ses propos « machistes ». Et, loin de rectifier ses propos, il insiste et en rajoute pour amplifier ses idées. Il tient des propos anti-féministes et affirme que « l'affranchissement de la femme ou amour libre » ne peut être possible, et que finalement, elles ne doivent pas se plaindre de ses écrits ; c'est leur faute : leur théorie et leur mode de vie amènent à « la décomposition sociale ». En définitive, il reste sur sa position : la femme doit garder le statut d'avant ce féminisme car c'est ainsi qu'elles inspirent le respect.
Proudhon appelle à l'établissement de conseils de famille et à l'adoption en faveur du mari d'un droit de mort sur sa femme en cas d'adultère, d'impudicité, d'ivrognerie, ou d'insoumission !
Il dit « Dans une société où la loi ne protège pas la dignité du chef de la famille, c'est au chef de famille de se protéger lui-même. »
Un brûlot radical et volontairement provocateur dans ses excès.

Pour la localisation de sa géocache, nous avons choisi la place de la Révolution. Connue pour ses différentes manifestations en tout genre. Quoi de mieux pour un révolutionnaire.
Elle est connue aujourd'hui pour être la place du musée des Beaux-Arts.